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Brins de mémoire

Brins de mémoire

Agnès Buisson

J'ai écrit "Brins de Mémoire" pour que mon père disparu me revienne et j'y suis arrivée. "Leur vie n'était pas conquête, elle était effritement et dispersion" d'après Georges Pérec. Celle de mon père l'était également. La nouvelle "mon père s'est tu" est un baume ayant la douceur du pardon, une paix en devenir. Mais j'ai cru naïvement que j'en aurai fini avec la Shoah. "Le juif est inéluctablement rivé à son judaïsme" d'après Lévinas et mon père le savait intimement. Pendant des années il s'est caché sous un châle de prières non pas en adéquation avec le "Père" mais avec lui-même. Il émanait de cet homme un Silence qu'il nous était impossible de briser et j'ai eu la faiblesse de croire que j'étais la seule qui aurait pu le rompre. Il a préféré disparaître que de se laisser amadouer, laissant un silence vrombissant comme le train qui l'a emporté.Son comportement suicidaire a donné naissance à ma colère qui a nourri ma vie de femme. La nouvelle "Mon père s'est tu" est la recherche de celui qui s'est éclipsé. Je l'ai retrouvé avant mon propre départ. Rencontre affectueuse et enfin intelligible. Mon père n'a jamais été aussi vivant. Dorénavant je suis là à son chevet. Enchaînée à son souvenir, celle d'une humanité exclue, je peux enfin partager avec lui, cet absent-présent, des brins de mémoire. Décidément je n'en aurai jamais fini avec la Shoah.

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Éditeur : Editions Le Manuscrit Langue : français
Genre : Mémoires et Biographies Sortie : 25 janvier 2016
Sous-genre : Mémoires

Biographie

Agnès Buisson

Agnès Buisson, auteur de "Dessine-moi" un wagon, est une vieille dame ayant survécu par miracle à une enfance brisée par la guerre, à une adolescence privée de père.
Habitée par une soif de vie, nourrie par les siens, époux, enfants, petits-enfant et arrière petite-fille, exaltée par son métier de médecin, elle a traversé l'existence émerveillée et reconnaissante.
Ce n'est qu'à partir de sa retraite qu'elle s'est jetée dans le monde des mots pour ne pas mourir.
L'absence d'une partie des siens, engloutis à Tréblinka et Auchwitz lui a laissé un vide abyssal, sa propre expérience de la grande rafle, du Vercors et de la disparition du père, une douleur prégnante.
Elle a cru adoucir sa peine et faire le deuil en écrivant "Brins de Mémoire" .
Impossible deuil. Son père Shrul Ruger est plus vivant que jamais.
Au crépuscule de sa vie, elle continue à la remplir par l'écriture, la lecture à voix haute et le conte.
Elle donne à entendre les auteurs qu'elle aime Singer, Barrico, Erri de Lucas , Stéphane Sweig, Jean de la Ville de Mirmont et bien d'autres...
Elle partage ses souvenirs avec les enfants des écoles pour qu'ils sachent
que l'on en aura jamais fini avec la Shoah mais que la vie est plus forte que tout.
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